Comité de défense du VERITABLE CAMEMBERT
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LE PROBLEME AUJOURD'HUI
Isigny Ste Mère et Lactalis, les deux plus gros producteurs de France de fromage au lait cru abandonnent l’AOC au nom de la sécurité alimentaire après mis en œuvre de nouveaux procédés de fabrication en espérant que l'Institut National des Appellations d'Origine Contrôlées (INAO) acceptera de réviser le cahier des charges de l'AOC.
Devant ce fait accompli, cette attitude ressemble fort à une action concertée pour infléchir des règles de fabrication qui ont permis de sauvegarder l’identité d’un produit reconnue pour ses qualités gustatives.
Les explications fournies ne justifient cette épreuve de force qui aurait certainement pu être éviter par une concertation et des tests préalables permettant de garantir l’amélioration de la qualité sanitaire et le maintien, voire le développement de la diversité des qualités gustatives.
Pourquoi cette précipitation ? – Quels sont les enjeux ?
Faire appel à la raison pour condamner des pratiques parce qu’elles datent du XIX° siècle sous prétexte d’une « non adaptation de nos corps » face à l’évolution des risques bactériologiques est une double assertion qui mériterait d’être effectivement prouvée.
A trop vouloir aseptiser, on crée certainement des modifications des défenses immunitaires. Toutefois l’équilibre naturel, la diversité des cas n’autorisent pas une généralisation abrupte qui ressemble fort à des théories de production de masse partant du principe d’une universalité des goûts pour les produits alimentaires. Même Coca-Cola adapte ses recettes en fonction des pays et des goûts des consommateurs.
Dans le monde, il existe des milliers de Camembert qui n’ont de Camembert que le nom … et nos industriels savent fabriquer des produits pasteurisés pour répondre aux exigences sanitaires les plus draconiennes … malheureusement, tout le monde en est conscient, au détriment du goût.
Le
Camembert AOC de Normandie par le respect des conditions de production traditionnelles
a su conserver une qualité que les autres lui envient. Prendre
le moindre risque sur la modification de la palette des goûts qu’elle
représente aujourd’hui est d’autant plus aberrant qu’il est naturellement
possible de vendre des produits sans l’appellation d’origine.
Rappelons nous que les consommateurs français ont redécouvert le camembert de Normandie au lait cru moulé à la louche après l’invasion des camemberts pasteurisés des années 80 et la diminution de la consommation globale qui en a résulté.
A l’époque, le constat de la disparition d’un choix de produits dans les rayons des Grandes Surfaces, l'omniprésence des Camemberts Président dans les linéaires avait fait disparaître toute concurrence, et est à l’origine du lancement du "Cœur de Lion". Les responsables commerciaux d’alors parlait de « Présidentite » …
Peu après le bicentenaire du Camembert de 1991, il a fallu apprendre aux chefs de rayon la différence entre les différents camemberts pour retrouver une offre diversifiée qui, en France, s’est traduite par un accroissement constant du marché des produits au lait cru et un redéploiement des linéaires.
Le constat de la perception de la diversité des goûts a été réalisée en proposant aux consommateurs des dégustations simultanées de plusieurs camemberts au lait cru. Michel Besnier s’est ainsi vu proposé une douzaines de ses produits. Il a été tellement convaincu qu’il a crée dans les semaines qui suivirent une nouvelle structure commerciale Fromages du Terroir qui est à l’origine de l’expansion qualitative vers les différents crus de fromage.
Le goût ne saurait être un concept de masse
L’évolution actuelle des consommateurs français et des gastronomes à l’échelon mondial en matière de goût est orientée vers la diversité, le respect d’une personnalisation qui voient le développement des initiatives en la matière : école du goût, dégustations publiques à grande échelle.
Opposer des enjeux sanitaires aux enjeux gustatifs nous semble être une erreur préjudiciable en terme de qualité du produit et de développement de marché
En matière alimentaire, en France particulièrement, nous avons l’exemple de la mutation du marché des vins qui nous encourage à prêcher pour cette diversité des goûts qui permet d’allier croissance du marché et diversité des qualités gustatives en respectant l’individualisme des consommateurs, leurs personnalités.
A l’origine ce marché de productions locales a vu déferler des négociants qui n’ont eu de cesse que d’imposer leurs marques. Dans les années 1950-1960, on vivait sous le règne des Vins du Postillon, des Geveor et autres Velours de l’estomac … avec la diminution perçue de la qualité, le marché s’infléchissait petit à petit.
Début des années 60, un négociant, SVB à Bonnières, osa lancer le premier vin de Pays, le Payrac qui remporta un succès tel que ses concurrents lui emboitèrent le pas rapidement. On assista alors à l’émergence des vins de Terroir. Fin des années 1970, des viticulteurs en quête d’une revalorisation de leur production, d’une reconnaissance de leur savoir faire, présentèrent dans les supermarchés locaux leurs produits sous forme de dégustation … et convainquirent les distributeurs de créer des rayons spécifiques, des caves pour valoriser la présentation de leurs produits. Cette démarche de qualité, d’éducation du consommateurs a porté ses fruits et, est à l’origine des caves à bières ... en attendant les caves à cidre !
Quand un producteur de lait évoque la différence de qualité suivant les modes d’alimentation des cheptels, quand il souligne la qualité du lait des vaches élevées à l’herbe, il se fait l’écho non seulement d’une politique que nous retrouvons chez un producteur de Livarot, mais de la mémoire de nos anciens producteurs fermiers, de nos consommateurs d’antan qui reconnaissaient la différence suivant les pâturages et les saisons. Sans aller jusque là, il est toutefois intéressant de noter que le développement du marché du camembert peut résulter de la diversification des produits à l’exemple des petits vins de pays.
Au delà de ce constat, nous pensons que d’autres enjeux économiques existent qui expliquent logiquement la précipitation de la décision de retrait « momentané » de l’AOC, de la prise de « risques commerciaux » !
La règle des 37 ° et la protection bactériologique imposées aux producteurs de lait ont justifié des charges d’investissement et de ramassage onéreuses. L’amélioration des marges implique en premier lieu, c’est bien connu, une minoration des prix d’achat. Les nouveaux procédés de fabrication permettent à l’évidence de modifier les règles de ramassage, leur périodicité, voire leur coût. Elles autorisent vraisemblablement la collecte de lait plus exposée bactériologiquement parlant, justifiant une pression sur les prix d’achat. Ces baisses ne permettent pas de compenser les investissements des agriculteurs.
La conquête des marchés extérieurs est aussi un enjeu économique important. Celle-ci peut certainement être réalisée avec des produits banalisés, sous vocable de marques précisant l’origine régionale si celle-ci a une signification réelle pour les acheteurs étrangers. Il nous semble que le nom de Camembert se suffit à lui-même si l’on en croit les demandes en tout genre d’utilisation du nom pour des produits alimentaires de toute nature, et notamment du vin. Sa perception comme produit français est synonyme de qualité.
En conclusion, nous souhaitons voir les producteurs différencier leurs productions en fonction des attentes des consommateurs, être capables de développer des lignes courtes de produits sélectifs pour répondre aux demandes de goûts différenciés et de contrer avec des produits internationaux de qualités gustatives et sanitaires plus universelles les produits, qui n’ont de Camembert que le nom.
Nous apprécions leur souci d’améliorer les conditions sanitaires de production et de distribution en leur demandant donc, de ne pas le faire en uniformisant les goûts et, en accord préalable avec les différentes parties prenantes sans les mettre devant des faits accomplis.